Or encens et myrrhe : pourquoi ces dons pour l’Enfant Jésus ?

Or encens et myrrhe : pourquoi ces dons pour l’Enfant Jésus ?

Les Rois Mages, figures fascinantes et représentatives de la tradition de Noël, amenèrent en don à l’Enfant Jésus or, encens et myrrhe. Mais qu’est-ce qui se cache derrière le choix de ces dons si particuliers ?

Les Rois Mages et leurs dons sont, depuis des milliers d’années, les protagonistes d’histoires et légendes, dans lesquelles le folklore populaire s’entremêle avec événements historiques, religion et traditions encore plus anciennes.

Dans cet article, nous souhaitons nous attarder sur or, encens et myrrhe, i.e. les dons que les trois Rois Mages amenèrent avec eux lors de leur voyage derrière la Comète, à travers le désert, avec ses pièges, esquivant les dangers et les intrigues de Roi Hérode, pour arriver jusqu’à la cabane de Bethléem où dans une mangeoire le Roi du Monde avait vu la lumière.

Dans l’histoire des Rois Mages, les légendes se mélangent avec d’autres légendes, dans un jeu de rappels et de renvois outre mesure suggestifs. Par exemple, le voyage des Rois Mages aurait concerné la Befana aussi, un autre personnage très cher à l’imaginaire de Noël en Italie, fêtée avec les Rois Mages le jour de l’Épiphanie. Elle aurait rencontré les trois voyageurs et auraient été à deux doigts de se joindre à eux.

Restée en arrière, elle aurait ensuite dédié le restant de sa vie à chercher l’Enfant Jésus, tout comme le quatrième Roi Mage qu’on avait mentionné, en amenant des dons à tous les enfants afin de compenser sa faute.

Un élément en commun entre les Rois Mages et la Befana est sûrement le fait qu’ils amènent des cadeaux.

Si les dons de la vieille dame au nez aquilin avec des verrues sont désormais une prérogative des enfants (rigoureusement sages, bien évidemment), les dons des Rois Mages conservent un symbolisme très profond, qui renferme néanmoins le mystère de la double nature de Jésus, Homme et Dieu. Au cours des siècles, de nombreux théologiens ont essayé d’expliquer la véritable signification symbolique des dons des Rois Mages. Certains ont écrit que l’or symbolisait la foi, l’encens la sainteté, la myrrhe la passion. Selon d’autres, les trois dons coïncident avec les trois vertus théologales : l’or est la charité, l’encens la foi et la myrrhe le libre arbitre.

Voyons les dons des Rois Mages un à la fois.

Encens : propriétés et bénéfices

L’encens, offert par Gaspar, le plus jeune des Rois Mages, est une résine obtenue de l’écorce des plantes de la famille des Burseraceae, originaire de la péninsule arabique et de l’Afrique nord orientale, en particulier la Boswellia cateri. Également appelé « gomme d’oliban », ou simplement oliban, l’encens a été utilisé depuis des temps immémoriaux pour cérémonies religieuses et rituels.

La fumée qui montait de l’encens brûlé était considérée comme une offrande appréciée par les dieux et favorisait la méditation et la purification. Le mot même d’« encens » dérive probablement du latin archaïque « incensum », allumé, et indique comme cette substance était utilisée.

Mais l’usage des encens allait bien au-delà des cérémonies religieuses et des rites de purification. Leur fumée avait également des propriétés désinfectantes pour l’air et des usages curatifs. En particulier, l’encens possède une puissante charge anti-inflammatoire, anti-oxydante et antimicrobienne. Ses qualités le rende très efficace pour relaxer corps et esprit, pour traiter les troubles intestinaux et respiratoires. Un bain chaud enrichi avec des gouttes d’huile d’encens combat le stress et transmet une sensation de paix et de détente à qui s’y immerge.

Mélangé au dentifrice, c’est un allié précieux pour l’hygiène buccale. Ses propriétés astringentes facilitent la résorption de rides et marques du temps, mais également de cicatrices, blessures, acné et vergetures. Il combat les troubles gastro-intestinales, de l’indigestion au syndrome du côlon irritable. Il influence également le niveau hormonal, en équilibrant les niveaux des hormones et en éliminant d’éventuels déséquilibres.

Beaucoup de ces applications concernant la santé du corps et de l’esprit devaient être déjà connues dans l’antiquité. En offrant l’encens à l’Enfant Jésus, le Mage Gaspar d’un côté L’honorait avec quelque chose de précieux et utile pour préserver et soigner le corps et, de l’autre, reconnaissait Sa nature divine, en lui offrant un don qui était habituellement offert en sacrifice aux dieux et qui était brûlé dans leurs temples.

Qu’est-ce qu’est la myrrhe ?

La myrrhe aussi, ou l’encens de myrrhe, amenée en cadeau par Balthazar, le Mage à la peau foncée, est une résine. Elle aussi est extraite du tronc d’une Burseracea, même si d’une autre espèce par rapport à l’encens : la Commiphora myrrha. Le terme « myrrhe » dérive du mot sémitique murr qui signifie « amer ».

Elle est originaire de la Somalie et d’Éthiopie, et ce n’est pas un hasard si celui qui l’amena était le Roi Mage aux traits somatiques des gens venant de ces terres-là. En réalité, les raisons qui amenèrent l’iconographie religieuse à représenter Balthazar comme un africain, avec la peau foncé, les cheveux crépus, le nez camus, sont très complexes et se sont développées au cours du temps

D’une part, il y avait la volonté d’attribuer aux trois Rois Mages des caractéristiques qui en faisait la personnification des trois continents et des trois races humaines, mais cela arrivait à l’époque médiévale. D’autre part, il faudrait s’attarder sur les nouvelles traditions, arrivées en Occident autour du XII-XIII siècle, concernant les martyrs-soldats de la Légion Thébaine, qui étaient nubiens et donc à la peau noire, ou sur la figure de « Père Jean », décrite par Marco Polo, qui se chevauchait avec celle de l’empereur des éthiopiens. Ces personnages insufflèrent une nouvelle vision des gens de couleur dans les peuples européens, habitués à associer la peau noire et certains traits somatiques au diable et aux créatures démoniaques.

Ce qui nous intéresse dans ce contexte est la myrrhe, la précieuse substance au parfum extraordinaire que ce Roi maure apportait en don. Depuis l’antiquité, la myrrhe était connue et appréciée pour ses propriétés antiseptiques et antibactériennes. Elle était utilisé surtout à l’état liquide, ou en poudre, mélangée avec des huiles et des baumes.

Encore aujourd’hui elle est utilisée sous différentes formes et avec d’innombrables finalités, pour ses vertus anti-inflammatoires, antispasmodiques et lénitives. On l’utilise comme remède dans les maladies respiratoires, mais également en cas d’intoxication alimentaire et, comme l’encens, elle était brûlée pour purifier l’air et transmettre paix et bien-être. En outre, l’huile dérivée de la myrrhe a d’excellentes propriétés lénitives et nourrissantes, précieuses pour hydrater les peaux délicates et sensibles sans les rendre grasses. Elle est parfaite également pour combattre contre les gerçures.

En ce qui concerne le symbolisme de la myrrhe comme don pour Jésus, comme l’encens indique la reconnaissance de la part des Rois Mages de Sa nature divine, ainsi la myrrhe célèbre Son humanité. Cela car, dans l’antiquité, la myrrhe était utilisé entre autres pour le culte des morts. Déjà dans l’ancien Égypte elle était employée dans le processus d’embaument, et on pensait qu’elle était déterminante dans la victoire de la vie sur la mort. Dans la Bible, elle est citée plusieurs fois dans le contexte sacerdotale, puisqu’elle était utilisée comme huile d’onction pour les prêtres et pour parfumer les habits cérémoniels, mais également en tant que porteuse de sagesse et d’amour (son arôme était considéré comme aphrodisiaque).

Dans la Passion de Christ, la myrrhe est présente d’abord mélangée avec le vin afin de soulager Ses souffrances et ensuite utilisée par Nicodème pour envelopper Son corps descendu de la croix. Encore, le jour de Pâques, les femmes qui se rendaient au tombeau amenaient des onguents aromatiques pour le corps de Jésus : ils étaient probablement à base de myrrhe et, dans cette acception, cette substance est liée à la Résurrection, signe que l’amour de Jésus est plus fort de la mort.

 

La signification symbolique de l’Or

Enfin l’or, don de Melchior, le plus âgé des Rois Mages. Son nom signifie en soi Roi et le don qu’il apporte, l’or, est exactement le symbole de la reconnaissance de la royauté de Jésus de la part des Rois Mages. En effet, l’or était le don réservé aux Rois et aux yeux des Mages Jésus était le Roi des Rois. Depuis toujours, ce métal précieux a été associé à la lumière, au soleil, à la capacité d’insuffler force et énergie. Toutes les grandes civilisations ont utilisé l’or pour glorifier leurs souverains et leurs dieux.

Selon différentes légendes Melchior offrit l’or en forme de pomme d’or, qui représentait la perfection du monde, et trente pièces d’or. Dans les mains de Jésus, la pomme d’or se réduisit en poudre, à symboliser que l’Enfant était venu pour amener un monde nouveau.

Les trente pièces d’or auraient été celles qu’Abraham avait utilisé pour acheter le champ de sépulture pour sa famille et lui, les mêmes offerts aux frères de Joseph quand il le vendirent comme esclave, arrivés ensuite par voie détournée au Temple de Jérusalem, où Melchior les aurait prix pour en faire cadeau à Jésus. Mais la légende continue : Marie perdit les trente pièces d’or pendant la fuite en Égypte et, avec elles, tous les autres dons. Un berger malade les trouva dans le désert, lorsqu’il se rendait à Jérusalem pour se faire guérir par Jésus, qui, entretemps, était devenu un homme. Le berger Lui offrit les dons et trente pièces d’or et Jésus les offrir à Son tour au temple. Ces mêmes trente pièces auraient payé la trahison de Judas.

Il existe également une intéressante théorie selon une traduction erronée de l’évangile de l’araméen, selon laquelle l’or cité n’aurait pas été le métal, mais l’or d’Orient, c’est-à-dire le curcuma. Cette épice à la couleur de l’or est dotée de grandes vertus curatives et cela la relierait aux propriétés de l’encens et de la myrrhe. De cette manière, les Rois Mages auraient offert à l’Enfant Jésus deux encens et une épice, tous des consommables précieux, tous profondément liés à la vie spirituelle des anciennes civilisations, au culte religieux et à celui des défunts, mais également au soin du corps, à la santé, au triomphe de la vie. Cette interprétation serait donc tout aussi appropriée.